Captivé par la dimension magique et religieuse de la musique, André Jolivet (1905-1971) ne pouvait s'empêcher d'avoir une prédilection pour la flûte, « expression profonde de l'humanité () qui charge les sons de ce qu'il y a en nous de viscéral et de cosmique ». Huit ans après les célèbres Incantations pour flûte seule de 1936, il écrit le Chant de Linos pour flûte et piano. Sa vocation pédagogique pièce d'examen pour les élèves du Conservatoire national supérieur ne masque pas sa gravité : dans la Grèce antique, il s'agissait d'un lamento funèbre chanté à l'origine à la mémoire du poète Linos, emporté par la jalousie d'Apollon. En 1945, le compositeur transforme cette pièce en un quintette pour flûte, violon, alto, violoncelle et harpe au charme puissant. Les Éditions Leduc publient une transcription pour saxophone soprano et piano écrite par Carmen Lefrançois et approuvée par Christine Jolivet, la fille du compositeur. Lefrançois évite magnifiquement d'étouffer la délicatesse de la musique sous la dynamique du saxophone, ce qui pourrait s'avérer excessif dans ce contexte. La mélopée, entrecoupée de danses rituelles, conserve son étrange beauté, touchant le cur d'une nouvelle génération de musiciens.
Fiche technique